Jean-François MILLET Gruchy, 1814 - Barbizon, 1875
Barque de pêche Huile sur toile
Signée 'J F Millet' en bas à gauche
Voir le scan haute définition de l'œuvre A fishing boat, oil on canvas, signed, by J. F. Millet
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Provenance : Vente après-décès de l'artiste, Paris, Hôtel Drouot, Me Pillet, 10-11 mai 1875, n° 39 (6.300 fr.), son cachet de cire rouge sur le châssis au verso ;
Collection Duncan, Londres ;
Collection Victor Desfossés, Paris ;
Sa vente, Paris, Mes Chevallier et Duchesne, 26 avril 1899, n° 43 (39.000 fr.) ;
Acquis lors de cette vente par Ernest Cognacq, Paris;
Collection Gabriel Cognacq, Paris ;
Sa vente, Paris, Hôtel Drouot, 14 novembre 1952, n° 31 ;
Acquis lors de cette vente par le grand-père des actuels propriétaires ;
Puis par descendance
Expositions : 'J.-F. Millet', Paris, Ecole des Beaux-Arts, 1887, p. 51, n° 42 (hauteur erronée)
'L'Art français au service de la science française', Paris, Chambre syndicale de la Curiosité, 25 avril - 15 mai 1923, n° 202
La Samaritaine de luxe, Paris, automne 1926
'Chefs-d'oeuvre de l'art français', Paris, Palais national des Arts, juin-octobre 1937, n° 369
'Mostra Internazionale del Paesaggio del Secolo XIX - Francia', Venise, XXIe Exposition biennale des Beaux-Arts, 1938, probablement n° 357
Bibliographie : Alexandre Piedagnel, 'J.-F. Millet', Paris, 1888, mentionné p. 71
Camille Gronkowski, "Quelques souvenirs sur M. Cognacq", in 'La Revue hebdomadaire', Paris, mars 1928, p. 120
Pierre Cabanne, "Les Cognacq", in 'Jardin des arts', n° 179, octobre 1969, visible p. 80 sur la photographie de la chambre de Gabriel Cognacq
Benjamin Couilleaux, "La collection Cognacq, entre legs et dispersion", in 'Choisir Paris : les grandes
donations aux musées de la Ville de Paris', Paris, Publications de l'Institut national d'histoire de
l'art, 2015, mentionné p. 50
Commentaire : " L'infiniment grand… "
À l'automne 1870, la France de Napoléon III capitule face à l'armée prussienne qui vient mettre le siège devant Paris. Tournant la page du Second Empire et de ses fastes, nombreux sont ceux qui délaissent les rives de la Seine pour rejoindre des cieux plus cléments. " Là où parle le canon, point de place pour l'art1 " ! : Jean-François Millet et sa famille ne font pas exception et quittent Barbizon pour rallier la région natale du peintre, la Normandie. Dès le mois d'août 1870, ils sont à Cherbourg et resteront près de 16 mois dans le Cotentin.
Bien que sa correspondance, notamment avec son ami Sensier, le décrive désemparé par les événements et peinant à " faire seulement un trait de crayon dehors² ", ce séjour sera pour le peintre de L'Angélus particulièrement fructueux, consolidant sa relation avec le marchand Durand-Ruel réfugié à Londres et lui permettant de s'adonner à un genre peu représenté dans son œuvre, celui des paysages côtiers et des marines.
Rochers moussus, herbes couchées par le vent, ciels nuageux peuplés de mouettes, vagues couronnées d'écumes, reflets du soleil faisant miroiter l'eau, frêles embarcations bercées ou malmenées par les flots, le pinceau de Millet navigue le long de la côte de Cherbourg à Gruchy et parvient à rendre sur la toile l'atmosphère si particulière de ce littoral, mettant toute sa sensibilité de peintre du dehors au service de la lumière.
Paul Durand-Ruel, dont le flair n'est plus à démontrer, ne s'y trompe pas : de Londres, il envoie de l'argent à Millet et présente en 1871, à l'occasion de la première exposition de la " Society of French Artists " dans sa galerie de New Bond Street, les 'Falaises de Gruchy' peintes en 1870 et conservées au Museum of Fine Arts de Boston (fig. 1). Le marchand recevra ainsi plusieurs marines exécutées par Millet durant son exil forcé, dont les eaux formées par les traits de pinceaux juxtaposés et parfaitement lisibles, passant du bleu profond au turquoise ou du vert pâle au violet lavande, témoignent d'une réelle modernité qui ne devait pas laisser indifférent le jeune Claude Monet, également présent à Londres aux côtés de Durand-Ruel pendant les événements de 1870-1871. " Impression, soleil levant " naîtra dès l'année suivante, en 1872, et les vues de Normandie réalisées par le peintre de Giverny dans les années 1880 porteront encore l'empreinte des mers irisées de Jean-François Millet (fig.2).
Mais revenons à 1871 et prenons à notre tour le large aux côtés des deux pêcheurs représentés par Jean-François Millet sur notre Barque. Celle-ci évolue sur une mer calme, dont les vaguelettes se parent de reflets presque argentés sous la lumière de la fin du jour. La petite voile légèrement renflée inspire l'apaisement, tout comme le marin sagement assis à l'arrière, tenant sans doute le gouvernail. De sombres et lourds nuages peuplent les cieux, transpercés en leur centre par les rayons du soleil qui viennent baigner la surface des flots créant une impression presque surnaturelle d'accalmie et de douceur après la tempête, comme due à une intervention divine. Nous savons que Millet eut à plusieurs reprises l'occasion de voir les barques d'Eugène Delacroix illustrant le thème du 'Christ sur le lac de Génésareth3', représentant le Messie endormi sur un frêle esquif malmené par la tempête, entouré par les apôtres apeurés et agités (fig. 3). Le halo de lumière et la tranquillité qui émanent de la figure de Jésus chez le peintre romantique, et l'issue de cet épisode qui verra les eaux du lac apaisées et le ciel s'éclaircir sur un simple mot de sa part (Mc, 4, 35-41) , résonnent avec l'arrivée providentielle des rayons du soleil au-dessus de notre embarcation. Le thème de la barque, symbole du passage d'une rive à l'autre, se prête par ailleurs à de profondes réflexions mystiques, et sera abondamment traité comme tel par un artiste comme Odilon Redon (fig. 4).
Romantisme, Symbolisme, Impressionnisme, Millet n'appartient pleinement à aucun de ces grands mouvements qui traversent le XIXe siècle, mais semble bien en faire la synthèse dans l'œuvre que nous présentons, réalisée au temps de cette maturité où l'artiste n'a plus besoin de faire ses preuves et laisse simplement la beauté d'un lieu et d'un instant saisir son inspiration. Laissons la plume de René Huygue nous décrire l'art de Millet à l'automne de sa carrière : " [Millet] s'ouvre à l'infiniment grand, le paysage domine : campagnes, plaines puis la mer. Terre et océan ébauchent à l'horizon la courbure du globe et la lumière émerveille l'espace : arcs-en-ciel, ondées qui glissent sous le nuage, tel le filet accroché à la barque, soleil irradiant à travers la brume ou le crépuscule (…). Tout devient plus vaste, plus près de l'émotion panthéiste du monde4. "
De l'atelier du peintre à la Samaritaine, une prestigieuse provenance
Il n'est pas toujours possible de retracer la destinée d'une œuvre de sa création à nos jours, mais le trajet de ces deux pêcheurs sur leur barque est particulièrement bien documenté. De l'atelier de Millet à l'hôtel Marcel Dassault, notre tableau fut accroché sur de prestigieuses cimaises et côtoya des chefs-d'œuvre intemporels. Duncan, Desfossés, les Cognacq, les propriétaires successifs de la Barque de pêcheurs de Millet se distinguent par l'éclectisme de leurs goûts, tant dans le domaine de la peinture que des arts décoratifs, avec toutefois une prédilection marquée pour le XIXe siècle et les peintres actifs en France au tournant du XXe siècle qui firent entrer l'art dans la modernité.
Présentée dans la vente après-décès de Millet qui se tint à l'hôtel Drouot en mai 1875, notre toile rejoignit la collection Duncan de Londres, au sein de laquelle flamboyait 'La mort de Sardanapale' de Delacroix (Paris, musée du Louvre). Acquise peu après par Victor Desfossés, la petite voile fut accrochée sur les murs de son hôtel de la rue de Galilée (fig. 5), où on la devine sous une tenture du XVIIe siècle et un pastel de Millet, 'Le cheval du paysan' (Amiens, musée de Picardie).
Au cours de la vente de la collection Desfossés, le 26 avril 1899, dont le clou fut incontestablement 'L'Atelier du peintre' de Gustave Courbet (Paris, musée d'Orsay), s'échangèrent également 'La Seine à Asnières' de Claude Monet (Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage), 'La Toilette' de Corot (collection particulière), 'L'Hercule de foire' de Daumier (Washington, The Phillips Collection), et bien d'autres importants jalons du XIXe siècle, de Delacroix à Pissarro. Parmi les amateurs qui se pressèrent pour assister à la vente événement se tenait le jeune Camille Gronkowski, futur conservateur du Petit Palais, qui y fit la connaissance d'un " monsieur déjà âgé, qui semblait fort myope5 ", Ernest Cognacq. Le commerce florissant du fondateur de la Samaritaine l'autorisait à débuter une ambitieuse collection avec son épouse Marie-Louise Jay, qu'ils étofferont et lègueront pour partie à la ville de Paris à la mort d'Ernest Cognacq en 1928. Boucher, Tiepolo, Chardin, Greuze… les chefs-d'œuvre du XVIIIe siècle que le visiteur peut aujourd'hui admirer dans l'hôtel de la rue Elzévir qui abrite le musée Cognacq-Jay auraient tendance à nous faire oublier que cette importante collection débuta initialement par des acquisitions d'œuvres d'artistes modernes, pour ne se consacrer aux Lumières qu'à partir de 1900 environ.
Lors de la vente Desfossés, Ernest Cognacq avoue avec simplicité à son voisin Gronkowski qu'il " n'y connait pas grand'chose " et lui demande ses lumières. C'est sur ses conseils qu'il achète Le Repos de Courbet et La Barque de Millet, marquant le début d'une relation de confiance qui devait durer entre les deux hommes. Ernest et Marie-Louise Cognacq ont également à cœur de partager leur collection et organisent dans les espaces de la Samaritaine de Luxe quatre expositions entre 1925 et 1927. La Barque de Millet y fut ainsi présentée à l'automne 1926, comme en témoigne une photographie ancienne (fig. 6).
Après le décès d'Ernest Cognacq, la direction de la Samaritaine et la collection d'œuvres modernes revinrent à son petit-neveu, Gabriel Cognacq, qui continua à enrichir cette dernière de pièces maîtresses de Manet, Van Gogh, Renoir, Cézanne, Degas..., mais aussi d'estampes anciennes et de livres rares. Une photographie de sa chambre de la rue Bugeaud nous fait découvrir les merveilles qui peuplaient son intimité, la petite voile de notre Barque de Millet s'y distingue à nouveau (fig. 7). Plus discret que son grand-oncle, la vente après-décès de la collection de Gabriel Cognacq fit pourtant grand bruit en attirant à juste titre tout ce que la capitale contenait de collectionneurs éclairés. C'est ainsi que les deux pêcheurs de notre barque changèrent de port d'attache, rejoignant en 1952 la collection du grand-père des actuels propriétaires qui, près de 70 ans plus tard, la laissent aujourd'hui à nouveau prendre le large vers l'horizon d'une nouvelle collection.
1. E. Moreau-Nélaton, 'Millet raconté par lui-même', t. 3, Paris, 1921, p. 58
2. Lettre de Millet à Sensier en date du 22 septembre 1870, 'ibid.', p. 61
3. En 1864 notamment, lors de l'exposition Delacroix qui se tint boulevard des Italiens et que Millet visita. Trois versions du 'Christ sur le lac de Génésareth' y était présentées. L'une d'entre elles appartint à Constant Troyon, ami et proche de Millet, voir A. R. Murphy, 'Jean-François Millet', Boston, 1984, p. 216, note 2.
4. R. Huyghe, " Millet : le retour à l'homme ", in 'La Nouvelle Revue des Deux Mondes', octobre 1975, p. 27
5. C. Gronkowski, "Quelques souvenirs sur M. Cognacq", in 'La Revue hebdomadaire', Paris, mars 1928, p. 120
"Infinitely Huge …"
In autumn 1870, Napoleon III's France surrendered to the Prussian army which had just besieged Paris. Turning the page of the Second Empire and its splendours, many abandoned the banks of the Seine to move to more forgiving shores. "Where cannons are talked about, there is no place for art!":1 Jean-François Millet and his family were no exception and left Barbizon to join his native region, Normandy. From the month of August 1870, they were in Cherbourg and would stay in the Cotentin for nearly 16 months. Although his correspondence, especially his exchanges with his friend Sensier, describe him as being distraught at the events and having barely "even drawing a line outside"², this period would be especially productive for the painter of the Angelus. It also marked a consolidation of his relationship with the dealer Durand-Ruel, exiled in London, that allowed him to work on a genre that was rarely represented in his work, that of coastal landscape and seascapes.
Mossy rocks, grass flattened by the wind, cloudy skies inhabited by seagulls, waves crowned by spray, reflections from the sun making the water shimmer, fragile boats rocked or pitched by the waves, Millet's paintbrush navigated along the coast from Cherbourg to Gruchy, recreating on canvas the unique atmosphere of this coastline, and applying his painter's sensitivity to the outside to render the light.
Paul Durand-Ruel, whose flair is well known, was right: from London he sent money to Millet and in 1871, at the first exhibition of the "Society of French Artists" in his gallery on New Bond Street, he showed Cliffs at Gruchy, painted in 1870 and now in the Boston Museum of Fine Arts (fig. 1). The dealer in this way received several seascapes made by Millet during his forced exile. In these, the water is formed by clearly visible juxtaposed brush strokes, moving from deep blue to turquoise, or from pale green to lavender purple, showing real modernity. These must not have left the young Claude Monet, who was also in London with Durand-Ruel during the events of 1870-1871, indifferent. "Impression, Sunrise" was created the following year, in 1872, and the views of Normandy created by Monet during the 1880s still showed the influence of the iridescent seascapes of Jean-François Millet (fig.2).
Let us return to 1870 and visit the broad expanse alongside the two fishermen painted by Jean-François Millet in our Boat. It is moving on a calm sea, the wavelets of which are adorned with reflections that are almost silvery under the light of dusk. The small sail, slightly swollen from the calm, inspires peace, as does the sailor wisely sitting behind, who is probably holding the rudder. Dark and heavy clouds populate the skies, pierced in the centre by rays of sunlight that bathe the surface of the sea, creating an almost supernatural impression of calm and gentleness after the storm, as if due to a divine intervention. We know that on several occasions Millet had an opportunity to see the boats of Eugène Delacroix illustrating the theme of Christ on the Sea of Galilee3, showing the Messiah sleeping on a frail skiff pitching in the storm, surrounded by terrified and agitated apostles (fig. 3). The halo of light and calm emanating from Jesus in the Romantic painter, and the outcome of this episode in which the lake's water becomes calm and the sky brightens after a simple word from him (Mk, 4, 35-41), resonate with the providential arrival of rays of sunlight above our boat. The theme of a boat, symbol of passage from one shore to the other, is also apt for deep mystical reflection, and was treated abundantly in this way by artists such as Odilon Redon (fig. 4).
Romanticism, Symbolism, Impressionism, Millet did not belong fully to any of these major movements of the 19th century, but seems to have made a synthesis of them in the painting presented here. Created during his maturity when the artist no longer needed to prove himself, he could simply allow the beauty of a place and an instant capture his inspiration. René Huygue describes Millet's art at the autumn of his career perfectly: " [Millet] opens to the infinitely large, landscape dominates: countryside, plains, and then the sea. Land and ocean sketch the curve of the globe on the horizon and the light makes the space magic; rainbows, rain showers that slide under the cloud, like a net attached to the boat, sun radiating through the mist, twilight or dusk (…). Everything becomes more vast, closer to the pantheist emotion of the world." 4
From the Painter's Studio to the Samaritaine, A Prestigious Provenance
It is not always possible to retrace the path of a painting from its creation until now, but the journey of these two fishermen on their boat is especially well documented. From Millet's studio to the Hotel Marcel Dassault, our painting has been hung on prestigious walls and hung alongside timeless masterpieces. Duncan, Desfossés, the Cognacqs, the successive owners of Millet's Fishermen's Boat, are exceptional for the wide range of their tastes, both in painting and the decorative arts, which however a marked preference for the 19th century and the painters active in France at the turn of the 20th century who brought modernity to art.
Included in Millet's posthumous sale at the Hôtel Drouot in May 1875, our picture entered the Duncan collection in London, in which Delacroix's Death of Sardanapalus (Paris, Musée du Louvre) shone. Acquired shortly afterwards by Victor Desfossés, the little sailboat was hung on the walls of his hotel on the Rue de Galilée (fig. 5), where it can be glimpsed beneath a 17th century tapestry and a pastel by Millet, The Peasant's Horse (Amiens, Musée de Picardie).
During the sale of the Desfossés collection, on 26 April 1899, the highlight of which was undoubtedly Gustave Courbet's The Painter's Studio (Paris, Musée d'Orsay), The Seine at Asnières by Claude Monet (Saint Petersburg, Hermitage Museum), Corot's La Toilette (private collection), The Strong Man by Daumier (Washington, The Phillips Collection), and many other remarkable works of the 19th century from Delacroix to Pissarro were sold. Among the connoisseurs who rushed to attend the sale, which was a major event, was Camille Gronkowski, future curator of the Petit Palais, who met there a "gentleman who is already old, and appeared very short-sighted",5 Ernest Cognacq. The flourishing business of the founder of the La Samaritaine department store allowed him to start an ambitious collection with his wife Marie-Louise Jay, which they enriched and bequeathed in part to the city of Paris on Ernest Cognacq's death in 1928. Boucher, Tiepolo, Chardin, Greuze…the masterpieces of the 18th century that the visitor can admire today in the hôtel particulier on the Rue Elzévir that houses the Musée Cognacq-Jay could make us forget that this major collection started initially with the acquisition of works by modern artists, and only focused on the Age of Enlightenment from about 1900. At the Desfossés, Ernest Cognacq admitted simply to his neighbour, Gronkowski that "I don't know much" and asked him for enlightenment. It is on his advice that he bought Courbet's The Sleepers and Millet's The Boat, marking the start of a lasting relationship of trust between the two men. Ernest and Marie-Louise Cognacq also wanted to share their collection and organized four exhibitions between 1925 and 1927 in the spaces of La Samaritaine de Luxe. Millet's The Boat was exhibited there in autumn 1926 as is proven by an old photograph (fig. 6).
After Ernest Cognacq's death, the management of La Samaritaine and the collection of modern works fell to his great-nephew, Gabriel Cognacq, who continued to add to the collection with masterpieces by Manet, Van Gogh, Renoir, Cézanne, Degas..., but also old master prints and rare books. A photograph of his bedroom on the Rue Bugeaud shows the wonders that inhabited his intimacy, the little sail of our Boat by Millet is again visible (fig. 7). More discrete than his great-uncle, the posthumous sale of the collection of Gabriel Cognacq caused a stir, rightly attracting all of Paris's enlightened collectors. This is how the two fishermen of our boat changed their homeport, joining in 1951 the grandparents of the current owners who, almost 70 years later, are leaving it today to take to the oceans towards the horizon of a new collection.
Traduction de Jane McAvock
1. E. Moreau-Nélaton, Millet raconté par lui-même, t. 3, Paris, 1921, p. 58
2. Letter from Millet to Sensier dated 22 September 1870, ibid., p. 61
3. In 1864 especially, at the Delacroix exhibition held on the Boulevard des Italiens and which Millet visited. Three versions of the Christ on the Sea of Galilee were shown. One belonged to Constant Troyon, and friend and intimate of Millet, see A. R. Murphy, Jean-François Millet, Boston, 1984, p. 216, note 2.
4. R. Huyghe, "Millet: le retour à l'homme", in La Nouvelle Revue des Deux Mondes, October 1975, p. 27
5. C. Gronkowski, "Quelques souvenirs sur M. Cognacq", in La Revue hebdomadaire, Paris, March 1928, p. 12
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