Hyacinthe RIGAUD Perpignan, 1659 - Paris, 1743
Portrait d'homme à l'écharpe bleue
Sold 55,104
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Hyacinthe RIGAUD Perpignan, 1659 - Paris, 1743
Portrait d'homme à l'écharpe bleue
Huile sur papier, de forme ovale
Annoté 'fait par Lexelente hiacinte Rigaud / 1684' et 'hyacinte Rigaud f - / 1684' au verso
Portrait of a man wearing a blue scarf, oil on paper, inscribed, by H. Rigaud
h: 9,50 w: 7,80 cm
Provenance : Probablement acquis par le grand-père de l'actuelle propriétaire, architecte à l'Institut de France, à Paris ;
Puis par descendance ;
Collection particulière, Belgique
Commentaire : Dans l'imaginaire collectif, l'art du portrait tel que le pratiqua Hyacinthe Rigaud trouve son parfait accomplissement dans l'emphase picturale du grand format, seul à même d'énoncer dans la sphère publique l'identité sociale du modèle. Le petit et l'intime semblent mal s'accommoder de la geste rigaldienne.
Pourtant, tout porte à croire qu'à l'instar de nombre de peintres de chevalet académiciens, Rigaud n'ait pas dédaigné durant toute sa carrière s'exercer au portrait en miniature, portatif et indépendant, ou monté en bijou. Les archives des commissaires au Châtelet de Paris se font ainsi l'écho, modeste, de ce pan de son activité, puisque le 2 juillet 1761, le bijoutier Benoît Richard, tenant boutique place du Louvre, vient déplorer le vol d'" une miniature peinte par Rigaud, représentant le Grand Dauphin " 1. Ailleurs, c'est au détour de l'exécution testamentaire de Rigaud qu'apparaît " un […] petit portrait en mignature [de son épouse Élisabeth de Gouy] dans une petitte boîte de chagrin à charnière et petits clous d'or, fermante à ressort avec une petitte glace au devant "2.
C'est dire combien cet admirable et émouvant petit portrait d'homme est un témoignage exceptionnel et rarissime de l'activité de Rigaud dans ce domaine, et ce d'autant plus qu'il porte, au dos, une mention manuscrite d'époque attestant de son attribution et de sa date d'exécution. La graphie de la première ligne, ainsi que la façon de souligner la date entièrement, ne sont d'ailleurs pas sans rappeler l'une des écritures figurant dans les livres de comptes de l'artiste, conservés à la Bibliothèque de l'Institut de France.
Dans un format légèrement plus ample que l'autoportrait de l'ancienne collection Calmann-Lévy (6,50 x 5,25 cm)3, notre homme est représenté selon le même parti pris, buste de profil vers la droite et visage faisant face au spectateur. Quant à la mise vestimentaire et à ses teintes, elles doivent être rapprochées, ce que conforte la datation des deux œuvres, du portrait de M. Sarazin de Lyon4, peint en 1685 : les deux modèles portent, simplement nouée autour du cou, une cravate en dentelles ; un ample manteau marron au revers bleu - une couleur qu'apprécie particulièrement Rigaud à ses débuts - dissimule les épaules, auxquelles se limite le portrait conçu en plan très rapproché.
La manière est également conforme à celle des débuts parisiens de l'artiste : le traitement du visage, d'une profonde sensibilité, allie la plus grande attention au moindre détail (rides d'expression sur le front, sourcils fournis, paupières tombantes, cernes et flétrissement de la peau au coin de l'œil, feu des joues et bleuissement de la peau, là où la barbe a été rasée), la science consommée des lumières (sur le bout du nez, dans les pupilles) et cette noblesse de bon aloi, qui tient à un air général et surtout à ce sourire à peine perceptible. Laissée au naturel, la chevelure léonine a cette légèreté ouateuse, parcourue d'infimes feux-follets de blanc, qui rappelle l'ascendant de van Dyck sur le jeune Rigaud. Les plis du manteau sont soulignés, comme à l'accoutumé dans la décennie 1680, d'un trait plus sommaire et géométrique.
Jamais portée au crédit de l'artiste avant la publication de notre monographie en 2016, cette proximité de Rigaud avec l'art de la miniature a été confortée par la découverte deux ans plus tard5, dans le fonds d'archives de l'érudit homme politique du Vallespir, François Jaubert de Passa, passé par l'atelier de David, d'un carnet manuscrit6, dans lequel Rigaud recopia ou fit recopier des chapitres entiers d'un des traités les plus connus dans l'art de la miniature, que la tradition attribue à un certain Claude Boutet7. Notre carnet porte la date de 1729, période durant laquelle Rigaud cherche à ré-orienter sa production et donne à son dessin une insistance et une méticulosité qui ne sont pas sans rappeler la démarche du miniaturiste.
Ce portrait d'homme en miniature sera inclus comme œuvre autographe de l'année 1684 dans le supplément au catalogue raisonné de Hyacinthe Rigaud, dû à Ariane James-Sarazin.
Notice complète sur artcurial.com
1. E. Campardon, " Le commerce des tableaux aux XVIIe et XVIIIe siècles, plaintes motivées par des vols ou escroqueries ", 'Nouvelles Archives de l'art français', 1879, t. 1er, p. 401.
2. Paris, Archives nationales, étude LXXIX, liasse 44, 28 juillet 1744.
3. A. James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659-1743), Dijon, 2016, t. 2, p. 21, n° P.5, repr.
4. Huile sur toile, 62 x 49 cm, collection particulière, voir A. James-Sarazin, 'op. cit.', p. 37, n° P. 80, repr.
5. A. James-Sarazin, conférence à l'hôtel du département des Pyrénées-Orientales à l'invitation des Archives départementales, Perpignan, 16 mars 2018, actes avec édition intégrale sous presse.
6. 1729, Perpignan, Archives départementales des Pyrénées-Orientales, 234JP25/1.
7. 'Traité de mignature pour apprendre aisément à peindre sans maistre…', Paris. La 1ère édition date de 1672.
Estimation 8 000 - 12 000 €
Sold 55,104 €
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