Vente Maîtres anciens & du XIX siècle - 13 novembre 2018 /Lot 16 Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco Saint André devant la ville de Tolède

  • Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco  Saint André devant la ville de Tolède Huile sur toile
  • Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco  Saint André devant la ville de Tolède Huile sur toile
Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco
Saint André devant la ville de Tolède
Huile sur toile

Saint Andrew, oil on canvas, workshop of El Greco
Hauteur : 72 Largeur : 41,50 cm

Provenance : Collection particulière, Paris

Commentaire : Aux cieux tourmentés et au panorama sculpté, taillé et façonné avec vigueur s'oppose dans la figure du saint une divine attitude, calme et mesurée, dont émane un intemporel rayonnement. La puissance des mains ouvertes est saisissante. Elles accueillent les fidèles et les invitent à suivre l'exemple du sacrifice symbolisé par la croix. Equilibre, puissance et harmonie audacieuse des couleurs nous plongent dans l'univers si particulier du peintre Greco.

Plusieurs versions de ce saint André sont connues et semblent toutes dériver du tableau conservé au musée du Prado à Madrid, Saint André et saint François (fig. 1, huile sur toile, 167 x 113 cm) signé en grec et en écriture cursive, datable vers 1590-1595, et appartenant au début du XVIIe siècle au duc d'Abrantes. Afin de répondre aux nombreuses commandes le maître s'entoura dans la dernière décennie du XVIe siècle d'un important atelier au sein duquel œuvre notamment son fils Jorge Manuel Theotocopouli. La figure de saint André fut individualisée pour être reprise de façon autonome dans l'atelier du maître comme l'atteste notre tableau ainsi que la version du Metropolitan Museum à New York (huile sur toile, 110 x 64 cm). Cette dernière toile, de dimensions plus importantes que la nôtre, n'accorde néanmoins qu'une importance réduite au paysage en arrière-plan, restant ainsi fidèle à l'esprit du grand tableau du Prado dans lequel l'intensité de la scène se concentre dans les expressions et la sainte conversation des deux figures.

Portons néanmoins une attention particulière à ce paysage fascinant et sublime représenté dans notre tableau : le panorama de la ville de Tolède s'offre à nous. Le pont San Martin sur le Tage se distingue à gauche avec le château de San Servando dans le fond, puis une partie des fortifications de la ville, enfin à droite le clocher de la cathédrale Sainte-Marie et l'imposant Alcazar dominant la ville. Le même angle de vue fut retenu par le Greco lorsqu'il peignit sa célèbre Vue de Tolède actuellement conservée elle aussi au Metropolitan Museum (fig. 2).
La ville de Tolède représente beaucoup pour le Greco. Sa naissance et sa jeunesse en Crête, son séjour à Venise puis à Rome forgèrent une personnalité riche et originale avant qu'il n'arrive à un âge déjà avancé en Espagne. Séjournant d'abord à Madrid, il doit composer avec les volontés de Philippe II et les exigences de l'inquisition. Ce contexte ne l'agrée pas particulièrement, il frêne l'expression de son talent. Tolède va lui permettre de se libérer de toute contrainte et d'exprimer sans limite sa conception nouvelle de la peinture. S'il réalise ses premières commandes pour la ville de Tolède en 1577, il ne s'y installera néanmoins qu'en 1585 et reçoit en 1586 la commande de son chef-d'œuvre, L'enterrement du comte d'Orgaz pour l'église Santo Tomé. C'est le début d'une période glorieuse, jamais plus Greco ne quittera la ville de Tolède. Certes capitale abandonnée en 1561 par Philippe II qui installe la cour à Madrid, Tolède n'en reste pas moins le grand centre culturel du royaume d'Espagne autour de 1600. Le Greco est proche des intellectuels et savants qui y résident et réalise de nombreux portraits de ces personnalités. L'attachement du peintre pour Tolède est sans limite, il s'agit bien du foyer qui permit l'épanouissement de son art, il s'agit du centre culturel, intellectuel et social au sein duquel cette grande personnalité pu faire exploser son talent.
Après son installation définitive à Tolède au milieu des années 1580 l'artiste gagne beaucoup d'argent et mène un train de vie luxueux qui englouti les revenus de son art. Les commandes affluent et un important atelier y répond. Paradoxalement, c'est durant cette période de développement de son atelier que l'art du Greco est le plus personnel. L'apposition de la signature sur ses œuvres devient quasi-systématique et les commandes importantes sont exclusivement traitées par sa main. En contrepartie, l'atelier doit répondre des commandes plus ordinaires, toujours sous le regard avisé du maître, qui avait placé sa confiance d'abord en Francesco Prevoste, peintre italien rencontré à Rome qui travailla avec lui dès 1574 jusqu'à la fin de sa vie, et en son fils à sa suite. S'ils étaient peintres, ces deux hommes étaient également chargés de représenter le maître dans les négociations de contrats et les affaires de paiement et de justice. Bien que très peu d'informations sur l'atelier nous soient parvenues, il apparaît tout de même que des artistes de grand talent y firent leurs armes. Outre les deux déjà cité, Anton Pizarro fut l'un des principaux interprètes des toiles de son employeur jusqu'au milieu des années 1590. Plus tard, vers 1597, ce fut le tour du peintre et doreur Francisco de Espinosa d'intégrer l'atelier et de répondre aux nombreuses commandes "à la manière de".
Aussi, notre tableau offre une première piste de lecture du fonctionnement de l'atelier de l'un des plus grands révolutionnaires de la peinture. En effet, notre œuvre, si elle découle largement du tableau du Prado, témoigne de la grande liberté et de l'autonomie de création des artistes de l'atelier tolédan. Les éléments majeurs des compositions sont intellectuellement conçus par le maître au gré des commandes, mais il laisse une liberté certaine dans l'élaboration à ses élèves, non simplement assujettis à la confection de copies. Parmi les quelques version du Saint André connues, aucune n'est exactement la même, chaque œuvre trouve son unicité, que ce soit par le traitement du ciel, la réalisation du paysage dans le fond voire même les expressions du visage du saint.
Estimation 60 000 - 90 000 €

Vendu 106 600 €
* Les résultats sont affichés frais acheteur et taxes compris. Ils sont générés automatiquement et peuvent subir des modifications.

Lot 16

Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco
Saint André devant la ville de Tolède

Vendu 106 600 € [$]

Atelier de Domínikos Theotokópoulos, dit Le Greco
Saint André devant la ville de Tolède
Huile sur toile

Saint Andrew, oil on canvas, workshop of El Greco
Hauteur : 72 Largeur : 41,50 cm

Provenance : Collection particulière, Paris

Commentaire : Aux cieux tourmentés et au panorama sculpté, taillé et façonné avec vigueur s'oppose dans la figure du saint une divine attitude, calme et mesurée, dont émane un intemporel rayonnement. La puissance des mains ouvertes est saisissante. Elles accueillent les fidèles et les invitent à suivre l'exemple du sacrifice symbolisé par la croix. Equilibre, puissance et harmonie audacieuse des couleurs nous plongent dans l'univers si particulier du peintre Greco.

Plusieurs versions de ce saint André sont connues et semblent toutes dériver du tableau conservé au musée du Prado à Madrid, Saint André et saint François (fig. 1, huile sur toile, 167 x 113 cm) signé en grec et en écriture cursive, datable vers 1590-1595, et appartenant au début du XVIIe siècle au duc d'Abrantes. Afin de répondre aux nombreuses commandes le maître s'entoura dans la dernière décennie du XVIe siècle d'un important atelier au sein duquel œuvre notamment son fils Jorge Manuel Theotocopouli. La figure de saint André fut individualisée pour être reprise de façon autonome dans l'atelier du maître comme l'atteste notre tableau ainsi que la version du Metropolitan Museum à New York (huile sur toile, 110 x 64 cm). Cette dernière toile, de dimensions plus importantes que la nôtre, n'accorde néanmoins qu'une importance réduite au paysage en arrière-plan, restant ainsi fidèle à l'esprit du grand tableau du Prado dans lequel l'intensité de la scène se concentre dans les expressions et la sainte conversation des deux figures.

Portons néanmoins une attention particulière à ce paysage fascinant et sublime représenté dans notre tableau : le panorama de la ville de Tolède s'offre à nous. Le pont San Martin sur le Tage se distingue à gauche avec le château de San Servando dans le fond, puis une partie des fortifications de la ville, enfin à droite le clocher de la cathédrale Sainte-Marie et l'imposant Alcazar dominant la ville. Le même angle de vue fut retenu par le Greco lorsqu'il peignit sa célèbre Vue de Tolède actuellement conservée elle aussi au Metropolitan Museum (fig. 2).
La ville de Tolède représente beaucoup pour le Greco. Sa naissance et sa jeunesse en Crête, son séjour à Venise puis à Rome forgèrent une personnalité riche et originale avant qu'il n'arrive à un âge déjà avancé en Espagne. Séjournant d'abord à Madrid, il doit composer avec les volontés de Philippe II et les exigences de l'inquisition. Ce contexte ne l'agrée pas particulièrement, il frêne l'expression de son talent. Tolède va lui permettre de se libérer de toute contrainte et d'exprimer sans limite sa conception nouvelle de la peinture. S'il réalise ses premières commandes pour la ville de Tolède en 1577, il ne s'y installera néanmoins qu'en 1585 et reçoit en 1586 la commande de son chef-d'œuvre, L'enterrement du comte d'Orgaz pour l'église Santo Tomé. C'est le début d'une période glorieuse, jamais plus Greco ne quittera la ville de Tolède. Certes capitale abandonnée en 1561 par Philippe II qui installe la cour à Madrid, Tolède n'en reste pas moins le grand centre culturel du royaume d'Espagne autour de 1600. Le Greco est proche des intellectuels et savants qui y résident et réalise de nombreux portraits de ces personnalités. L'attachement du peintre pour Tolède est sans limite, il s'agit bien du foyer qui permit l'épanouissement de son art, il s'agit du centre culturel, intellectuel et social au sein duquel cette grande personnalité pu faire exploser son talent.
Après son installation définitive à Tolède au milieu des années 1580 l'artiste gagne beaucoup d'argent et mène un train de vie luxueux qui englouti les revenus de son art. Les commandes affluent et un important atelier y répond. Paradoxalement, c'est durant cette période de développement de son atelier que l'art du Greco est le plus personnel. L'apposition de la signature sur ses œuvres devient quasi-systématique et les commandes importantes sont exclusivement traitées par sa main. En contrepartie, l'atelier doit répondre des commandes plus ordinaires, toujours sous le regard avisé du maître, qui avait placé sa confiance d'abord en Francesco Prevoste, peintre italien rencontré à Rome qui travailla avec lui dès 1574 jusqu'à la fin de sa vie, et en son fils à sa suite. S'ils étaient peintres, ces deux hommes étaient également chargés de représenter le maître dans les négociations de contrats et les affaires de paiement et de justice. Bien que très peu d'informations sur l'atelier nous soient parvenues, il apparaît tout de même que des artistes de grand talent y firent leurs armes. Outre les deux déjà cité, Anton Pizarro fut l'un des principaux interprètes des toiles de son employeur jusqu'au milieu des années 1590. Plus tard, vers 1597, ce fut le tour du peintre et doreur Francisco de Espinosa d'intégrer l'atelier et de répondre aux nombreuses commandes "à la manière de".
Aussi, notre tableau offre une première piste de lecture du fonctionnement de l'atelier de l'un des plus grands révolutionnaires de la peinture. En effet, notre œuvre, si elle découle largement du tableau du Prado, témoigne de la grande liberté et de l'autonomie de création des artistes de l'atelier tolédan. Les éléments majeurs des compositions sont intellectuellement conçus par le maître au gré des commandes, mais il laisse une liberté certaine dans l'élaboration à ses élèves, non simplement assujettis à la confection de copies. Parmi les quelques version du Saint André connues, aucune n'est exactement la même, chaque œuvre trouve son unicité, que ce soit par le traitement du ciel, la réalisation du paysage dans le fond voire même les expressions du visage du saint.
Estimation 60 000 - 90 000 €

Vendu 106 600 €
* Les résultats sont affichés frais acheteur et taxes compris. Ils sont générés automatiquement et peuvent subir des modifications.

Détails de la vente

Vente : 3381
Date : 13 nov. 2018 18:00
Commissaire-priseur : Matthieu Fournier

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Maîtres anciens & du XIXe siècle